Nous avons pu tester Necrom en avant-première

À l'occasion d’un événement presse présentant le prochain Chapitre de TESO, nous avons pu mettre les mains sur Necrom et explorer la Péninsule Telvanni et Apocrypha avec la nouvelle classe, l’arcaniste. Nous vous narrons ce que nous y avons vu.

The Elder Scrolls Online: Necrom

Entre le visible et ce qui n’a pas encore été vu, ce qui semble et ce qui est, se trouve le gouffre de l'ignorance. Le destin de l'Homme dérive comme des algues dans le filet de Son esprit. – Adorateur de Hermaeus Mora

Nous nous sommes laissés dériver, comme des algues, sur les rivages humides de la Péninsule Telvanni. Ces rivages, nous ne les avions pour ainsi dire jamais vus. Ou bien il y a si longtemps, dans nos errances sur TES: Arena, que les grains de leur sable ressemblent dans les fragments de nos souvenirs à des milliers de petits carrés flous. C’est une terre étrange où les cèpes ont la taille des mauvaises promesses et absorbent l’eau salée comme un mouchoir boit les larmes des trahis. Et pourtant, à les regarder, ces champignons fructifient sur un paysage qui ressemble à un vieux rêve familier. Et plus nous avançons sur cette lande faite de trous où gisent les mares salines, plus nous comprenons que cette saumure n’est pas faite de larmes, mais de mélancolie. Une fonge qui s’abreuve des humeurs des êtres qui la foule. Car quelque part sur cette grève infinie, encastrée dans la cage thoracique que forme quelqu’invraisemblable structure rocheuse, se trouve Necrom, la cité des morts. Les processions qui strient ces terres s’y rendent toutes, en recueillement, dans la nostalgie de la mémoire des défunts. Nous aussi, nous strions en silence, suivant les cortèges pour éviter les flaques trop profondes. Parce que nous ignorons encore tout de ces glaises volcaniques, et que nous voulons éviter le gouffre.

Puisqu’il faut nous souvenir, quelques points doivent être mentionnés. D’abord, rappelons-nous que cette itération de l’univers des Elder Scrolls que nous appelons The Elder Scrolls Online est sortie il y a neuf ans, en 2014, et qu’elle représente depuis l’un des plus grands RPG cross-platforms. 22 millions de comptes ont été créés depuis sa sortie, et le jeu a reçu six récompenses d'affilées comme MMO de l’année, ainsi que le prix GLAAD 2018 du jeu de l’année, et qu’il est actuellement nominé pour les BAFTA 2023. Le monde n’a fait que grossir depuis. Et c’est aussi une œuvre littéraire, puisqu’il y a plus de neuf millions de mots dans le jeu, incluant 200’000 lignes de dialogues. Assez pour intéresser Hermaeus Mora pour sûr, mais nous reviendrons au Démon de la connaissance plus loin. Et pour celles et ceux qui s’intéressent aux langages plus algorithmiques, le jeu consiste en plus de 26 millions de lignes de code. Ce que le Chapitre de Necrom apportera, ce sont plus de trente heures de quêtes sur fond d’horreur cosmique dans deux zones : la Péninsule Telvanni et Apocrypha, une nouvelle classe Arcaniste, deux nouveaux compagnons, une nouvelle épreuve, et des améliorations de qualité de vie.

Alors que les Dunmer de la procession à laquelle nous nous étions joints nous racontait ceci, nous voyions notre environnement changer. Pas tant par le panorama, quand bien même la solidité des collines verdoyantes après Bal Foyen nous manquait – ce limon donne à cette région l’aspect mou d’une limace colorée rampant sur la mer. Non, c’est surtout par ces groupes d’habitants que se découpent ses étendues. Au sud de la péninsule, il n’y a guère plus que les géants fongiques naissant sur le littoral. Mais sur la bordure de la Mer intérieure, encerclant l’est de Vvardenfell, la souveraineté Telvanni est absolue. Les gens rejettent le Pacte ici. En fait, ils rejettent tout ce que nous autres sommes en mesure de comprendre. Ils suivent des pratiques qu’eux seuls semblent connaître. À vrai dire, ils donnent l’impression de ne partager que des énigmes, et peut-être un peu de reconnaissance pour ceux qui les résolvent.

Alors que nous nous rapprochions de Necrom, nous entendions dans les bouches des mages et des scribes que nous croisions sur la route, des rumeurs sur un obscur complot conté par une sorte de sage répondant au nom de Leramil. Celle-ci affirmerait que dans les abysses des royaumes daedriques, les Princes Vaermina et Peryite tenteraient de rendre aveugle Hermaeus Mora, le Connaisseur inévitable dont il faudrait alors percer les mille yeux. Difficile de savoir que croire ici, mais les membres de notre procession ont eu l’air de prêter beaucoup de crédit à ces rumeurs, particulièrement depuis qu’un devin de notre groupe a prédit que toute cette histoire se terminerait sur un développement inattendu comme on ne l’a encore vu dans aucune autre histoire. Nous nous retrouverons suspendus à une falaise quand le chapitre se refermera, nous a-t-il mystérieusement dit, et nous n'aurons de réponse que dans les chapitres qui suivront au fil des ans.

À un moment, nous avons dû faire demi-tour pour trouver une autre route car Deux Dunmer du nom de Naryu et d’Ashur se sont approchés pour nous prévenir que ce chemin menait au Bord de la Folie, une épreuve, nous dirent-ils, qui se révèlerait aussi difficile que Rochebosque au Bois noir et que seul une bonne douzaine de mercenaires sauraient affronter. Nous choisîmes d’écouter leurs avertissements.

Nous ne savons pas à quel moment cela s’est produit, mais en revenant sur nos pas, nous avons dévié un peu trop de la route. Les Cendrais ne dissocient pas l’Oblivion de notre monde. Ils disent que l’un fait partie de l’autre, et que parfois l’espace prend des raccourcis. Nous avons pris un de ces raccourcis. Sans nous en rendre compte, comme ça. Nous nous sommes retournés et la route avait basculé. Je ne sais pas si les Cendrais diraient que cet endroit fait partie de notre monde. À nous, il paraît intolérablement différent. Cela ressemble à une archive où toute chose serait cataloguée dans ces moindres détails, même les êtres vivants que la tourbière vrombissante transforme en pierre.

Nous craignions devenir – ou peut-être l’étions-nous déjà – une entrée de plus dans cet abjecte volume, quand des sons anormaux ont fait se matérialiser un portail de runes vertes duquel est sortie une elfe dont la tenue entière semblait nous observer. Nous nous sommes empressés de lui demander qui elle était, mais sa seule réponse fut qu’elle était arcaniste. Elle nous fit signe de la suivre, et nous protégea rapidement contre les créatures difformes qui peuplaient ce domaine, certaines flottantes, d'autres rampantes, et puis encore de misérables choses qui lisaient sans jamais souffler, tous les mots qui imprimaient ce royaume. Ce qu’elle faisait dépassait l’entendement. Elle semblait compter en permanence les runes qui flottaient autour d’elle et qu’elle utilisait parfois, jamais aux mêmes moments, pour renforcer ses sorts. Tous les rôles lui saillaient : parfois elle nous soignait, parfois elle portait des coups, et elle savait aussi les encaisser. Elle pointait de brûlants rayons sur nos attaquants, bondissait d’un portail à l’autre, marquait le sol sous les pattes de ces cibles. D’autre fois, un tel rayon était pointé en notre direction et nous nous remettions des dommages subis. Impossible pour nous d’y comprendre un cycle. Elle semblait s’adapter en temps réel, inventer sa technique en fonction du déroulement du combat. Nous n’avions jamais vu ça. C’était une toute nouvelle façon de se battre qui surprendrait même les plus grands maîtres de guerre. Et puis, alors que l’écho de ses sorts rendait au silence sa normalité après l’avoir saturé de bruits évoquant les profondeurs entre les étoiles, elle montra simplement une direction du bras, et s’évapora dans un ultime crépitement.

Nous errâmes longtemps dans ce que nous comprenions être Apocrypha, la bibliothèque infinie du Prince daedra Hermaeus Mora. Nous avons découvert que cette “bibliothèque” possède deux facettes : l’une où la tourbe entre les incunables, brossée de la lueur d’un émeraude blême, regarde un ciel couvert de tâches d’encre ; l’autre, où ce même ciel pulse d’un pourpre agressif et se contracte comme pour penser, et à chaque impulsion de nouveaux tentacules percent le sol et s’entremêlent pour ressembler à des machines aux fonctions délirantes. Deux faces du filet de Son esprit.

Nous avons fini par trouver un hameau. Nous ne sommes pas les seuls à avoir été catalogués. Ici, les gens se nourrissent des histoires écrites sur les pages qui filent dans les airs et celles dans les tomes qui émergent de la boue. Ils lisent jusqu’à ce que leurs deux yeux se rejoignent. Moi, j’écris. J’écris ces lignes sur une page que j’ai trouvée qui, étrangement, n’avait pas de contenu. J’écris pour qu’ils lisent avant que leurs yeux ne se soient complètement joints. Parce qu’avant cela, il y a toujours un espoir que ces mots ne soient pas vrais. Avant de pouvoir voir, nous croyons encore, naïvement, que tout cela est un mensonge, que ce que raconte ces textes n’existe pas, et que cette page sous ma plume n’est qu’un apocryphe.

L’avis de la rédaction

L’avis de Nakalololo

Le point fort de ce Chapitre est sans conteste sa nouvelle classe. L’arcaniste est vraiment très différente des autres classes du jeu : on peut vraiment ressentir qu’il y a eu une grosse réflexion sur la façon dont de nouvelles choses pouvaient être apportées en manière de gameplay. Je me fais la réflexion à chaque nouvelle classe ajoutée au jeu que celle-ci paraît plus dynamique que les autres, mais pour l’arcaniste, c’est encore le niveau d’au-dessus. La gestion des points de combo rend les combats totalement différents. On ne se focalise plus uniquement sur les ressources, on cherche aussi les moments où il est judicieux de faire monter les points de combo, et les moments où on les relâche pour renforcer nos sorts. Je ne sais pas si la volonté d’absence de rotation prédéfinie résistera à la méta du jeu, mais pour ce que j’en ai vu, la tentative est prometteuse. Et le ressenti de la classe, avec ses effets visuels et son sound design, est génial ! On a l’impression de jouer à un shooter de science-fiction.

Contrairement aux précédents Chapitres, celui-ci offre deux régions : la Péninsule Telvanni et Apocrypha. La Péninsule Telvanni est sans doute l’itération la plus réussie d’une région de Morrowind. L’atmosphère qui s’en dégage, les ambiance et les animations donne réellement à la zone une vie comme nous n’en avions pas en Vvardenfell ou dans les Éboulis ou Deshaan. C’est comme si nous voyons réellement Morrowind en mouvement, éclairée par des lumières qui ne l’avaient jusque-là que frôlée. La région manque peut-être cependant un peu de diversité, même si la variété des champignons qui y poussent parmi les formations rocheuses lui donne une identité unique. Cette diversité, c’est Apocrypha qui l’apportera.

Apocrypha est très réussie. On a tout de suite l’impression d’être transportés dans le DLC de Skyrim : Dragonborn. Les partis pris par ZeniMax Online Studios sont intéressants, notamment celui de porter l’idée des archives jusque dans le terrain, le parsemant des archives naturelles que sont les fossiles. Le plus grand de ces partis-pris, c’est de diviser la zone en deux pour en faire un côté ressemblant à ce que nous connaissions de Dragonborne, et un côté totalement différent représentant en quelque sorte l’esprit d’Hermaeus Mora ou teintes violacées. Une autre liberté prise pour le domaine du dieu de la connaissance est la présence d’un village en sein. Il est surprenant de voir des maisons au milieu de cette étrangeté, quand bien même siègent-elle sur des tomes empilés. Mais il faut bien que ceux qui se perdent dans ce royaume aient un endroit pour se regrouper. Et bien sûr, une zone de MMO a besoin d’un hub : le genre à ces limitations et ses codes. Il y a donc une belle diversité de biomes dans ce Chapitre, mais il faudra se perdre en Oblivion pour la trouver.

Enfin, la ville même de Necrom est très réussie. Ses artères sont labyrinthiques, le pouls de ses rues y pulse d’un battement unique, et sous les grands monuments, les catacombes sillonnent. La direction artistique y est pour sûr très soignée : on y ressent la solennité, le respect des ancêtres. Ce n’est pas une cité des morts un peu grossière aux os apparents. C’est une cité ancestrale de recueillement et de rites.

J’ai pu jouer à Necrom qu’une petite heure. Difficilement donc d’en faire un test exhaustif. Ce que je peux dire, c’est qu’alors même que la musique n’avait pas encore été implémentée, le travail sur les ambiances est frappant. La nouvelle classe semble plus dynamique qu’aucune autre, et la nouvelle façon de disséminer l’intrigue principale, qui a l’air de retourner vers une grande intrigue mondiale qui durera plusieurs années, ne peut qu’exciter la curiosité. Après neuf ans, The Elder Scrolls Online ne cesse de se renouveler. Avec ce Chapitre, il donne le sentiment qu’il est un tout nouveau jeu, et montre qu’il est toujours l’un des mastodontes du marché des MMORPG, ou RPG Online comme il aime à se présenter.

 

> Lire notre interview de Rich Lambert, directeur créatif,
et CJ Grebb, directeur artistique <

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